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Pourquoi le Rassemblement national est en voie de normalisation

En cette année 2024 olympique, le Rassemblement national (RN) a le vent dans le dos et le corps tout entier tourné vers la ligne d’arrivée : l’élection présidentielle de 2027. Les européennes de juin sont, à ses yeux, moins un obstacle qu’un tremplin vers l’objectif élyséen, qui n’est plus une chimère après les douze mois écoulés.
Cet article est tiré du « Bilan du Monde, édition 2024 ». Ce hors-série est en vente dans les kiosques ou par Internet en se rendant sur le site de notre boutique.
En 2023, le parti d’extrême droite a en effet accéléré sa normalisation, avec l’espoir d’achever sa dédiabolisation dans l’esprit des Français. Une succession de sondages atteste d’une métamorphose réussie, qui passe aussi par l’émergence d’un bicéphalisme comme le parti n’en a jamais connu : Jordan Bardella existe dans l’opinion, à l’étage inférieur de Marine Le Pen mais au-dessus des chefs de partis de gouvernement. Le RN profite pleinement de la configuration − inespérée − issue des élections législatives de 2022, qui lui offre un accès aux médias inégalé et le deuxième groupe à l’Assemblée nationale, où Emmanuel Macron ne dispose pas de la majorité absolue. La présence de Marine Le Pen au Palais-Bourbon, à l’inverse de Jean-Luc Mélenchon, lui a permis d’incarner l’opposition au président de la République.
Le RN entamait pourtant l’année dans une situation inconfortable. Le débat s’ouvrait sur la réforme des retraites, un sujet sur lequel le parti a évolué en pleine campagne présidentielle, un an plus tôt, abandonnant le totem du départ à 60 ans et proposant des pistes qui comportaient leur lot d’incohérences. Se dessinait une mobilisation dont le parti serait en marge : les syndicats de salariés refusaient la présence du RN dans les cortèges et, en province, très peu de députés s’y risquaient par crainte d’un accueil hostile. Le RN, peu actif à l’Assemblée, absent dans la rue mais très présent dans les médias et sur les réseaux sociaux, a pourtant réussi le tour de force d’incarner dans l’opinion l’opposition partisane à la réforme, notamment en votant les motions de censure présentées par la gauche.
S’est ensuite ouverte une séquence plus favorable, marquée par des débats sur la violence et l’immigration en France. Depuis la mort de Nahel M., tué lors d’un contrôle de police le 27 juin à Nanterre (Hauts-de-Seine), le débat politique est saturé par les thèmes chers à l’extrême droite. A la fin de l’été, les rencontres de Saint-Denis ont acté l’intégration par l’Elysée du RN dans le champ républicain et accéléré le changement de statut de Jordan Bardella ; l’immigration a dominé les débats, à travers l’idée – désormais abandonnée – d’élargir les questions soumises à référendum, puis l’adoption du projet de loi sur l’immigration.
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